The Svedberg et Arne Tiselius : Les premiers développements de la chimie moderne des protéines à Uppsala
par Kai O. Pedersen
Comprehensive Biochemistry, vol 35, Elsevier, 1983, 233 - 281
(Version partielle, sans références ; partie 3)
Page 251 - Tiselius fit une étude très minutieuse des diverses sources d'erreurs dans la technique d’électrophorèse et de la manière de les contrôler. L’intensité de courant limite, aboutissant à une migration sans convection, fut établie à partir d’expériences avec des courants alternatifs. Des électrodes réversibles, argent - chlorure d'argent, remplacèrent les anciennes. Les volumes des réservoirs des électrodes furent calculés d'après des considérations théoriques. Les conditions optiques et photographiques furent redéfinies, une échelle de concentration pour l'absorption de la lumière fut établie à l'aide d'enregistrements microphotographiques et une justification théorique ajoutée pour l'utilisation du point correspondant à 50 % de concentration comme définissant la véritable position de la frontière. Plusieurs types d'anomalies de frontières furent discutés. Finalement, les comportements électrophorétiques de quelques protéines bien définies, comme l'albumine de l'œuf, la sérumalbumine et la phycoérythrine ont été déterminés. Dans des mélanges de telles protéines uniformes, les composants se révélèrent migrer indépendamment (page 252 : photo de Tiselius ; page 253) les uns des autres. Les préparations de globines de cheval fractionnées par les sels montrèrent une migration non homogène, mais aucun point d'inflexion défini ne fut détectable sur les courbes d'enregistrement photographique. page 253 - En 1930, Tiselius soutint une thèse pour le grade de docteur es sciences à l'Université d'Uppsala. Dans celle-ci, il décrivit les résultats de ses études théoriques et expérimentales étendues sur la méthode utilisant le mouvement de la frontière pour l'étude de l'électrophorèse de protéines (Ref 33 : TISELIUS, A., Nova Acta R. Soc. Scient. Upsal. (4), 7 1930, N° 4, 1 - 107).
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Chromatographie des substances incolores
Page 273 - Peu de temps après son engagement comme professeur de biochimie, Tiselius commença à élargir le champ de ses centres d’intérêt de recherche. Il avait souhaité que sa nouvelle technique d’électrophorèse puisse être également utile pour l’élucidation d’un problème de grand intérêt pour lui, à savoir l’isolement et l’identification de grands fragments et de polypeptides obtenus par dégradation douce de molécules protéiques. De ce point de vue, la nouvelle électrophorèse fut décevante ; il trouva qu’elle n’était pas suffisamment spécifique pour séparer la multitude des substances se rencontrant dans la matériel d’origine biologique. Il s’intéressa ensuite aux méthodes d’adsorption qui avaient été utilisées dans les préparations organiques et biochimiques. La séparation avait jusque là été étudiée essentiellement sur colonne après la conclusion de l’expérience. Tiselius vit la possibilité de développer une nouvelle méthode analytique quantitative dans laquelle la séparation dans l’éluat sortant de la colonne pouvait être observée par des méthodes réfractométriques similaires à celles utilisées en électrophorèse. Il donna également un traitement théorique qui reliait le volume de rétention d’une substance adsorbée à son coefficient d’adsorption et la masse d’adsorbant dans la colonne. Il considéra la modification du comportement d’adsorption se produisant du fait de la présence d’un second adsorbant plus fortement adsorbé[21] [22] Page 273 - Toutes les premières expériences furent réalisées par analyse frontale qui permettait une détermination de la concentration des constituants dans un mélange, mais ne permettait pas leur séparation. Cette dernière fut réalisée en utilisant une méthode par élution. Les composants élués, cependant, montraient une traînée (« queue ») importante. En 1943, Tiselius montra que cela pouvait être évité par addition à la solution d’élution d’une substance ayant une plus grande affinité d’élution que tous les constituants du mélange. Cette méthode a depuis été appelée analyse par déplacement[23]. Page 273 - Les volumes de rétention spécifiques furent déterminés pour un grand nombre d’acide aminés et de peptides, et il fut trouvé que la longueur de la chaîne carbonée avait une influence décisive, chaque groupe -CH2 - produisant une augmentation donnée. Les volumes de rétention des acides aminés neutres restaient stables pour une vaste domaine de pH, alors que ceux des acide aminés acides et basiques montraient une importante dépendance du pH. page 273 - Une amélioration technique importante fut réalisée par Tiselius et Claesson[24] quand ils introduisirent les méthodes interférométriques pour mesurer la concentration de l’éluat. L’objet de ce développement était de limiter l’instabilité liée à la faible différence de densité entre des couches voisines de l’éluat en restreignant le mélange par convection aux (page 274) très faibles volumes. Le volume du canal interféromérique était seulement 0,13 ml, et cet appareil fonctionnait thermostaté. En plus, un collecteur de fraction manuel était présent pour collecter les fractions d’effluent. L’équipement peut être vu comme l’ancêtre des montages automatisés actuels de chromatographie d’analyse et de fractionnement. Ce dispositif expérimental était exceptionnellement bien adapté à une étude détaillée des processus fondamentaux sous-tendant l’analyse chromatographique et son utilisation aboutit à des avancées théoriques et à leur vérification expérimentale. page 274 - Les distinctions furent faites entre analyse frontale, élution et déplacement. Dans l’analyse frontale une solution est appliquée en continu sur une colonne d’adsorbant, et à cause de la différence des volumes de rétention se développe une série de gradients de concentration correspondant aux différents solutés séquentiellement ressemblant à la situation dans l’électrophorèse à frontière mobile. Avec cette procédure la séparation complète des composants dans un mélange n’est pas possible, mais seulement leur identification et leur estimation.
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Page 278 - Graduellement, Tiselius s’intéressa de plus en plus à la surveillance des oiseaux et à leur photographie dans leur environnement naturel. Au printemps, il faisait de longues excursions la nuit avec son fils, Per, à quelques distances d’Uppsala, où il lui serait possible d’observer le comportement de cour des grands tétras (« capercailzie ») et d’écouter les plaintes (« crooning ») du coq de bruyère (« blackcock ») (P. Tiselius [25] ). A d’autres moments de l’année Tiselius et ses amis faisaient beaucoup d’excursions pour surveiller et photographier des oiseaux. Cet intérêt de Tiselius aboutit en Juin 1961 à la formation d'une petite « académie privée », la « Bäckhammar Academy od Sciences » qui consistait en un groupe de ses amis qui avaient un intérêt commun en ornithologie. L’académie incluait cinq membres et leurs femmes. Tiselius était le président ; le vice président était le Dr Victor Hasselblad, le constructeur de la camera Hasselblad bien connue. L’académie se réunissait environ dix jours par an, normalement durant le printemps au manoir de Jonsbol, appartenant au Dr Hasselblad et (once part) de l’état de Bäckhammar. De Jonsbol ils firent des excursions à des endroits variés de Värmland pour étudier et photographier la vie très riche des oiseaux dans cette partie de la Suède. Page 278 - L’impression la plus fine de la personnalité aux multiples talents de Tiselius peut être obtenue en étudiant son article de 1968 « Réflexions des deux côtés de la barrière »[26]. Page 278 - Arne Tiselius mourut le 29 Octobre 1971, et il est enterré au cimetière d’Uppsala, pas très loin de sa maison. (page 279) - Une biographie de la vie de Tiselius ainsi qu’une bibliographie de ses différentes publications peuvent être trouvées dans les Biographical Memoirs of the Fellows of the Royal Society[27]
En retrospective,
Page 279 - En regardant en arrière le développement de la chimie des protéines durant les 50 - 60 dernières années, on peut trouver que beaucoup de progrès ont été réalisés grâce à l’utilisation des méthodes physico-chimiques. L’introduction par Svedberg de l’ultracentrifugeuse aboutit à la découverte que les protéines sont des substances chimiques bien définies, ayant des poids moléculaires bien définis. La vitesse de sédimentation en ultracentrifugation, et plus tard la technique d’électrophorèse selon Tiselius , rendit possible dans beaucoup de cas de visualiser d’une manière beaucoup plus directe le degré d’efficacité de l’isolement et de la purification d'une protéine donnée. Cela amena Svedberg à avancer son hypothèse du système multiple des poids moléculaires des protéines. Et bien que cette théorie ne soit pas d’une nature aussi générale que Svedberg l’avait supposé au début, cela a une grande influence sur le développement de la chimie des protéines, spécialement dans les années 30 et au début des années 40. Cela initia un intérêt nouveau et plus important pour ces groupes de substances. Plusieurs chimistes et physiciens découvrirent que les protéines ne doivent pas plus longtemps être considérées comme des colloïdes indéfinis, mais étaient bien définis, (à savoir comme) des substances excessivement intéressantes et importantes, (à savoir) des substances bien intéressantes à étudier. Page 279 - Une des premières étapes avait été franchie dans la nouvelle science de la biologie moléculaire Cependant, plusieurs étapes supplémentaires devaient être franchies avant que les problèmes en relation avec la composition chimique détaillée et la structure des protéines puissent être abordés. Page 279 - De telles étapes nouvelles furent introduites dans les années 40 et les décades suivantes par Tiselius et ses collaborateurs. Ils développèrent et introduisirent dans la chimie des protéines nombre de nouvelles méthodes de séparation et de fractionnement, plus spécifiques
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